Témoignage : Un parcours de vie, une preuve de force

Travailler 26 ans avec un trouble bipolaire : un parcours de vie, une preuve de force

J’ai 61 ans. Et pendant 26 ans, j’ai travaillé à temps plein tout en vivant avec un trouble bipolaire. Ce n’est pas un exploit héroïque, ni une performance à glorifier. C’est une réalité vécue, souvent silencieuse, parfois éprouvante, mais aussi riche d’enseignements.

Diagnostiqué après plusieurs années de troubles de l’humeur, de phases d’exaltation suivies de périodes sombres, j’ai dû apprendre à vivre avec cette maladie invisible. Vivre, mais aussi travailler, chaque jour, malgré l’instabilité émotionnelle, la fatigue mentale et la nécessité constante d’un équilibre précaire.

Le travail comme ancrage

Travailler a été pour moi un point d’ancrage. Un cadre. Une routine nécessaire pour ne pas me perdre dans les extrêmes que m’imposait parfois la maladie. J’ai connu des moments où l’énergie semblait illimitée, où je multipliais les projets avec une confiance démesurée… mais aussi des périodes où sortir du lit relevait de l’exploit.

Malgré cela, j’ai tenu bon. J’ai assuré mes responsabilités, respecté mes engagements, parfois au prix de luttes silencieuses. Mon emploi m’a permis de garder un lien social, un rôle dans la société et une structure indispensable à ma stabilité.

Le silence, parfois nécessaire

Je n’ai pas toujours parlé de mon trouble. Dans le monde professionnel, la santé mentale reste encore un sujet tabou. Je craignais d’être jugé, mis à l’écart ou perçu comme “moins capable”. Et pourtant, j’étais là, chaque jour, à mon poste, comme n’importe quel collègue. Peut-être même avec plus de vigilance, de discipline, de conscience de mes limites.

Quand j’ai trouvé une oreille bienveillante – un supérieur compréhensif, un collègue empathique – cela a fait toute la différence. On ne traverse pas une telle maladie seul. Le soutien humain compte autant que les traitements médicaux.

Un message d’espoir

Aujourd’hui, je suis stabilisé, et j’ai voulu témoigner. Pour montrer qu’un trouble bipolaire n’est pas une fin, ni un frein absolu. C’est un défi, oui. Mais avec un suivi adapté, une bonne hygiène de vie et un environnement professionnel respectueux, il est possible de construire une vie active et digne.

Mon message s’adresse à celles et ceux qui vivent avec un trouble psychique et doutent d’eux-mêmes. Mais aussi aux employeurs, collègues, décideurs : derrière chaque diagnostic, il y a une personne compétente, motivée, qui ne demande qu’à être reconnue pour ce qu’elle est, et non pour ce qu’elle vit en silence.

J’ai travaillé 26 ans avec cette maladie. Ce que je retiens ? C’est possible. Et c’est profondément humain.

Par: Drissi Chbihi Amine

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